Résumé : Cet article se situe dans la continuité d’une recherche qui voudrait aborder les
révolutions arabes, et notamment la révolution tunisienne, à partir des productions langagières et de la circulation des discours. Il s’agit d’analyser du point de vue de la linguistique énonciative et de la sociolinguistique périphérique ce qu’on pourrait dénommer de façon générique, le langage de la révolution. A l’occasion d’un récent travail sur les enjeux de la traduction arabe des termes idéologiques (laïque, communiste, libérale) et leur circulation dans le débat politique tunisien, j’avais trouvé nécessaire de prendre en compte la question de la place du français dans ces débats. La francophonie se posait comme une problématique incontournable dans tous les échanges entre acteurs politiques qui n’ont eu de cesse de questionner la notion d’identité nationale. Ainsi, ce corpus est apparu comme un lieu de réflexion très riche sur les rapports entre langue, politique et identité. La place du français dans les débats politiques en Tunisie n’est pas nouvelle, elle travaille et est travaillée par les rapports ambivalents entretenus entre les deux pays depuis des siècles. Parler français pour une femme ou un homme politique tunisien est un acte énonciatif qui a une valeur éthicopolitique indéniable et qui peut l’exposer à des critiques ou au contraire participer à sa promotion. Avant d’aborder l’analyse de ce corpus constitué d’exemples d’échanges entre des députés à l’assemblée nationale (désormais ANC) j’ouvrirai mon propos par un retour sur la problématique du bilinguisme en Tunisie.